ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE
12 Décembre 2023
Allocution de la Présidente, Cathy OUSTRIERE
Merci d’être venu aussi nombreux pour cette assemblée générale extraordinaire ! Nous vous accueillons emplis d’émotions car cette assemblée générale s’inscrit dans un moment difficile, compliqué et crucial de la vie de l’association Le fil à Métisser.
Cette assemblée Générale extraordinaire s’inscrit dans une procédure spéciale d’alerte lancée début novembre par le Commissaire aux Comptes M. HUDELLET, ici présent, à qui je laisserai la parole à la suite de mon intervention.
Un rappel général du contexte dans lequel se trouve l’association :
Depuis fin 2020 (moment où l’association a vu diminuer la prestation que nous avions avec la mairie de Perpignan), nous n’avons cessé d’alerter les institutions financières sur la fragilité financière de l’association. A l’assemblée générale du 7 juin 2023, j’avais annoncé la crainte d’afficher pour la deuxième fois consécutive un déficit pour l’exercice 2023 mais aussi la forte crainte de ne pas pouvoir poursuivre les activités en 2024.
Les éléments apportés dans mon courrier du 14 novembre au commissaire aux comptes, pour justifier de la situation financière dans laquelle l’association se trouve, sont des éléments récurrents mis en avant par l’ensemble du milieu associatif, lui aussi en souffrance :
- Des actions partiellement financées qui demandent à l’association d’ajuster les temps et contrats de travail mais des actions qui perdent aussi l’essence du projet initial
- Des actions qui, en cours d’année, ne sont pas refinancée, ce qui nécessitent l’arrêt de l’action mais aussi la fin de contrats de travail : pour exemple, le dispositif de médiation santé que nous avons dû interrompre par deux fois, fin septembre 2022 (arrêt contrat de travail de Sylvia COLOMBIER) et fin juillet 2023 (arrêt contrat de travail de Gaëlle MAROLLE).
- Des financements qui nous sont notifiés très tardivement alors que certaines actions sont inscrites dans le temps et dans la durée (temps d’écoute psychologique)
- Des financements qui sont versés très tard dans l’année en cours, ce qui rend très compliqué la mise en œuvre de l’action – d’autant plus si celle-ci est une nouvelle action.
- Une réception des financements qui ne correspond donc pas au calendrier de mise en œuvre de l’action.
- Un CPOM avec la préfecture qui a pris fin en 2022 (deux CPOM avec la préfecture / les temps d’écoute psy) ; ce type de contractualisation garantit durant 3 ans des financements et apporte donc un peu de sécurité.
- Une baisse des enveloppes budgétaires notamment dans le cadre de la politique de la ville.
- Une trésorerie réduite d’année en année qui ne permet plus de faire face aux différents déficits
Le 03 octobre 2023, le Conseil d’Administration a convié l’ensemble des financeurs et le collectif des habitantes de St Jacques et du Nouveau logis à une rencontre afin de les informer de la situation critique de l’association et du manque criant de perspectives. Seuls le Conseil Départemental et la CAF ont participé à cette réunion : les autres financeurs (exceptés le président de l’Agglomération de PMM et la représentante de la Fondation de France) ne se sont pas excusés pour leur absence.
Lors de cette réunion, le CA a donc fait part de ses inquiétudes, de l’arrêt du réseau de Santé de professionnels XARXA ainsi que des groupes de parole « être heureux au collège » et du dispositif de médiation santé – ce qui signifie la fin de plusieurs contrats de travail mais aussi la réduction du temps de travail notamment sur les temps d’écoute psychologique de proximité. Dans le cadre de cette réunion, nous avions aussi évoqué la souffrance psychique des salariés et des membres du CA face à la situation d’insécurité dans laquelle se trouve l’association. Le manque de réactivité et la défiance institutionnelle étant perçu comme un manque de reconnaissance (voire de désaveu).
Au sein de cette réunion, le collectif des femmes, à travers la voix de deux de ses représentantes, ont pu aussi exprimer combien les actions du Fil étaient importantes, voire vitales, pour les femmes mais aussi pour la scolarisation des enfants.
A la suite de cette réunion, le CA a été informé que se mettait en place, sous l’égide de la préfecture, un « Comité des Co-financeurs » du Fil à métisser. 3 réunions se sont ainsi déroulées, le 13 octobre en préfecture, le 23 octobre à l’ARS et la dernière à nouveau en préfecture, le 27 novembre. Ce comité des financeurs regroupent les services de l’État la préfecture, l’ARS, la ville de Perpignan, le CD, la CPAM, la CAF et l’agglomération Perpignan Méditerranée Métropole.
⚠️ A la suite de la première réunion, le comité des co-financeurs nous a notifié plusieurs éléments à prendre en compte :
- le fait que les financeurs ne souhaitent plus financer le réseau santé XARXA de professionnels,
- à la demande de l’ARS, la mise en place d’un audit externe qui serait financé sur le budget des actions.
- La baisse de 10 % annoncée sur l’enveloppe financière Politique de la Ville de la part de la ville et du CD66
- Le manque de perspectives de la part de la Préfecture sur l’enveloppe Cités Educatives.
- Il nous a donc été demandé dans un contexte budgétaire tendu de diminuer le prévisionnel de 2024 et de l’axer sur deux axes : le premier autour de la santé mentale et le second autour de la parentalité.
⚠️ A la deuxième réunion, les membres du Bureau LFAM ont présenté un budget prévisionnel 2024 réduit – un budget passant de 293 000 euros en 2023 à 216 000 euros pour 2024.
A l’issue de cette deuxième réunion, force a été de constater que les co-financeurs n’avaient toujours pas pu déterminer le montant financier qu’ils pourraient, chacun à leur niveau, engager sur l’exercice 2024. Le point positif que le Bureau a pu retenir, c’est la volonté des 3 principaux financeurs (Préfecture, ARS, Ville) de mettre en place des CPOM. L’ARS a formulé le souhait de faire évoluer les accompagnements réalisés par les psychologues et d’ainsi réduire les accompagnements autour de 5 consultations par personne avant de passer ensuite le relais (ce protocole pouvant être, en fonction des situations, reconduit). Il est à noter que nous n’avons eu aucun compte rendu de ces réunions sur lesquels s’appuyer.
⚠️ Dans le cadre de la troisième et dernière réunion, le Fil a présenté le projet associatif « le fil santé-familles », projet travaillé avec la CAF. Deux axes se déclinent dans ce projet : celui sur le soutien santé mentale et celui sur le soutien à la parentalité (le budget prévisionnel se montant à 214 118 euros).
Au cours de cette 3ème rencontre, seule la CAF a pu indiquer clairement le montant qu’elle pourrait octroyer au fil sur l’exercice 2024 si ce projet santé famille se mettait en place. L’ARS a indiqué qu’au vu des difficultés de trésorerie du Fil, celle-ci pourrait dès début février verser la même enveloppe de 30 000 euros qu’elle verse depuis 10 ans sur l’action des temps d’écoute psychologique (en réservant 4 000 à 5 000 euros pour un audit externe), ce qui enlève logiquement du temps financé à l’action…
Concernant la ville et la Préfecture, le nouveau Contrat de Ville ne sera signé qu’à la fin du mois de mars 2024 ; aucune des institutions concernées par la Politique de la Ville ne connaissant à ce jour les axes et thèmes qui seront retenus. Ainsi : est-ce que la santé mentale fera partie d’un axe prioritaire ? Si le CD est partie prenante sur le projet santé famille (notamment sur l’axe parentalité), nous ne connaissons pas à ce jour le montant financier qu’il pourrait allouer.
Enfin, concernant la reprise du déficit annoncé (autour de 10 000 euros sur l’exercice 2023), aucune réelle proposition n’a été faite.
Au vu des incertitudes, les co-financeurs nous ont demandé de poursuivre l’activité du fil en réduisant encore plus le temps financé sur les temps d’écoute de proximité (c’est à dire de passer de 1,3 ETP à 0,4 ETP d’écoute psychologique) ; pour rappel, le temps d’écoute psychologique est le projet socle de l’association : le voir se réduire à peau de chagrin impacte l’essence même de notre projet associatif. Le dispositif de médiation santé mentale financé dans le cadre (de la CALPAE porté par l’Agglomération PMM) est financé sur l’exercice 2024 (convention à signer d’ici la fin décembre 2023) : pas de possibilité que ce dispositif continue à être financé en 2025 notamment dans le cadre du futur Pacte des Solidarités. A ce jour, en tant que présidente, je n’ai pas voulu signer cette convention à cause du manque de projection financière et de par les contraintes indiquées dans la convention.
En résumé, à l’heure où je m’adresse à vous, les incertitudes demeurent : nous n’avons aucun engagement clair et par écrit des financeurs. La plus grande incertitude porte sur les financements dans le cadre de la Politique de la Ville (40 000 euros Préfecture-ville). Le quartier St jacques bénéficie du NPNRU mais aucune information nous a été donnée sur le volet social. Au vu de l’implantation du Fil dans le quartier, de son activité, des besoins de plus en plus importants exprimés par la population, l’association devrait assez logiquement pouvoir être soutenu dans le cadre du NPNRU.
Au final, en tant que présidente de cette association, je suis infiniment triste de constater que le Fil est en danger et ne va pas pouvoir, au vu du manque de soutien et d’engagement financier clair, poursuivre son activité en 2024. Je souhaitais signaler l’épuisement des salariés et des membres du CA. Des mois que nous nous battons pour nous faire entendre ! Je pèse mes mots : j’ai une longue expérience du monde associatif et je ne comprends toujours pas pourquoi l’association que je préside reçoit un tel traitement de la part des institutions ! Le manque de dialogue, de considération, de bienveillance, de reconnaissance du travail effectué depuis tant d’années, sont autant de signes qui me plongent dans un état d’abattement et de désespérance.
❤️Je voulais ici redire (car c’est sûrement la dernière fois que je pourrais l’exprimer devant vous tous ici) combien j’ai été fière de présider cette association qui a su porter un beau projet, qui a répondu présent quand les institutions nous ont demandé d’intervenir dans le cadre de la Covid pour enrayer le cluster communautaire, qui a su toujours se réinventer, innover, se développer… Cette équipe est formidable car elle a toujours su travailler avec et pour les habitants, car elle a toujours su répondre aux besoins et aux attentes exprimées. Elle est formidable car elle porte haut les valeurs républicaines et parce qu’elle a, chevillée au corps, une éthique professionnelle au sens de Ricoeur.
❤️❤️Mon dernier mot s’adresse au Collectif des femmes gitanes et aux partenaires. Merci à vous toutes, les femmes gitanes, de vous être autant mobilisées, merci pour ce soutien indéfectible qui témoigne de la connaissance et reconnaissance mutuelle, merci enfin aux nombreux témoignages de partenaires ; le réseau de santé XARXA a été un très beau projet que vous a su faire vivre durant plus de 10 ans. Merci à vous tous !
Cathy OUSTRIERE, Présidente.